mercredi 16 juin 2010

Médias européens (2/3) : "Les pays de l'UE ont tous les mêmes problèmes"

Heidi Bruns, rédactrice en chef d'Arte Journal à Strasbourg répond aux questions des Chroniques de l'étudiant. De la difficulté et des atouts de faire un journal d’information à dimension européenne pour des téléspectateurs allemands et français.


Chroniques de l'étudiant : Vous êtes la rédactrice en chef d'Arte Journal. En quoi consiste votre travail à la rédaction ?

Heidi Bruns : Je suis responsable d'une équipe franco-allemande d'environ trente journalistes permanents. On fait deux émissions par jour, l'une vers 12 h 45 et l'autre d'une demie heure le soir. Je décide avec mon adjoint et les chefs d'édition des sujets que l'on va traiter dans Arte Journal, de l'actualité du jour.

Chroniques de l'étudiant : Le fait que la rédaction soit franco-allemande permet-il de prendre du recul sur un sujet qui va traiter de la France ou de l'Allemagne, à la différence d'un média national comme TF1 ou France 2 ?

Heidi Bruns : Oui, c'est ça le défi. On ne traite pas de la même façon les sujets nationaux. On se voit un peu comme une chaîne que les gens regardent en plus des autres chaînes. On se demande si tel ou tel sujet tient la route pour les Français. Par exemple, la réforme des retraites : En quoi c'est intéressant pour les Allemands ? Il faut trouver des sujets qui intéressent à la fois les Français et les Allemands.

Chroniques de l'étudiant : Est-ce que ce n'est pas un peu difficile de se procurer quotidiennement de l'information "européenne" ?

Heidi Bruns : On trouve beaucoup de sujets de société qu'on peut voir de plusieurs manières. Par exemple, la proposition de loi contre l'absentéisme à l'école en France : On va regarder comment ça se passe dans d'autres pays. Quelles sont les solutions apportées en Grande-Bretagne, où il existe déjà une loi à ce sujet ?

Il y a bien sûr l'information institutionnelle qu'il faut donner : les lois, les règlements européens...

Chroniques de l'étudiant : Avoir toujours l'Europe en arrière-pensée, quand on traite l'actualité, permet de voir en fait qu'il y a plus de points communs entre les pays européens qu'on pourrait le penser.

Heidi Bruns : Tout à fait. L'Europe ce n'est pas toujours l'Union européenne. Ce sont des nations différentes qui ont les mêmes problèmes. Ca se voit bien avec la crise financière. On a tous les mêmes problèmes en Europe. On les traite de manières différentes [ndlr, dans chaque pays de l'Union européenne].

Quelques fois on a la chance d'avoir une "dispute" entre Nicolas Sarkozy et Angela Merkel. Ca, pour Arte, c'est le sujet à faire, évidemment. On arrive bien à trouver des sujets qui ne parlent pas uniquement à un seul pays.

Chroniques de l'étudiant : L'équipe d'Arte Journal doit être un peu "éclatée" pour avoir une dimension européenne et internationale. Cela implique peut-être un peu plus de mobilité par rapport à un journal télévisé national ?

Heidi Bruns : C'est vrai. On a un bureau à Paris et à Berlin. Les journalistes se déplacent souvent pour faire des reportages. On a des pigistes dans le monde entier pour les duplex.

Chroniques de l'étudiant : Est-ce que le fait d'être diffusé en Allemand et en Français ne pose pas des problèmes sur la façon de traduire l'actualité ?

Heidi Bruns : Assez souvent. Les journalistes doivent comprendre ces deux langues. On a des expressions qui n'existent pas dans une langue ou l'autre. Par exemple, la loi Hartz IV en Allemagne, ce sont des règles sociales qui existent d'une manière un peu similaire en France mais ce n'est pas exactement la même chose. Il faut trouver le petit mot qui explique de quoi il s'agit pour que tout le monde le comprenne.

Chroniques de l'étudiant : En effet, ça serait un peu réducteur de dire que le Hartz IV correspond au RMI en France.

Heidi Bruns : Oui, ce n'est pas exactement la même chose.

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